Ce matin du troisième jour, il fait beau sur Dijon. La fatigue commence un peu à se faire sentir mais nous sommes toutes et tous motivé.e.s. et s’est d’un pas décidé que nous nous rendons à pieds à l’auditorium de Dijon, appelé plus communément le Palais des Congrès. La journée s’annonce bien remplie. Nous devons nous préparer dans l’après-midi à voter sur une question épineuse qui divise notre organisation depuis quelques temps déjà, à savoir pour ou contre l’adhésion à la FSM. Pour l’heure, nous arrivons (la délégation de société d’études au complet) aux places assignées dans la grande salle du palais des congrès. La séance de la matinée commence sous la présidence de Valérie Lesage, Secrétaire d’une Union Départementale d’Île de France. En tant que déléguée au Congrès Confédéral, je me réjouis qu’une femme soit présidente de séance. La Direction de notre organisation semble enfin faire de grands progrès sur la place des femmes dans la CGT et commence à nous reconnaître au sein d’instances dirigeantes.
Nous reprenons les interventions de delégué.e.s sur le thème 1 du document d’orientation ayant pour trait la réalité du travail et son avenir avec les évolutions technologiques comme le numérique. De nombreuses thématiques seront abordées dans cette matinée. Je suis un peu déroutée car les interventions des camarades, toutes pertinentes qu’elles soient, n’ont peu, voire pas, de rapport avec le thème 1 sur lequel nous devons voter. Malgré tout les camarades délégué.e.s qui prennent la parole sont force de conviction. Des questions fondamentales se posent. Comment se projeter dans la vie alors que nous ne faisons face à la déshumanisation du travail, point soulevé par un camarade de la Fapt. Christophe de la Fédération du Spectacle nous alerte sur les suppressions de postes suite à une nouvelle attaque du gouvernement Macron et sur la réduction des budgets publics alloués à l’audiovisuel. Christophe de la Ferc interpelle la CGT dans son ensemble sur les violences policières perpétrées ces derniers mois dans les manifestations et demande à la confédération d’appeler à manifester le 2 juin prochain pour protester massivement contre la répression qui s’abat sur les Gilets Jaunes et par généralité sur tous les mouvements contestataires. S’est également un cri d’alarme qui est poussé par notre camarade délégué du syndicat Castorama de la Fédération Commerce. L’enseigne Bricorama et Castorama fermera en France 9 magasins dans les prochains mois. Au total dans ce secteur se sont 3000 salariés qui vont se retrouver sans emploi ; le délégué évoque le terrorisme social. Dans bon nombre d’interventions le même cri est scandé « Rassemblons-nous pour être plus forts, sinon nous sommes foutus, quand toute la CGT œuvre dans le même sens, tout est possible ». Un camarade des territoriaux du Val de Marne ajoute que le congrès est souverain, et que notre organisation doit envoyer des messages forts. Cédric, délégation des fonctionnaires de l’état (Chancellerie) déplore le peu de relais de la confédération sur la fusion des greffes. Dans toutes les interventions qui ont lieu c’est le même constat, il faut revenir à nos fondamentaux. « Nous sommes un syndicat de lutte de classe et pas d’opposition de classe, les mots sont importants » assène Benjamin Amar ; son intervention est saluée par de vifs applaudissements.
Vient le temps de défendre les amendements du thème 1, malheureusement pris par le temps (nous sommes très en retard sur le timing) des camarades ne peuvent intervenir. S’ensuit une confusion et un brouhaha mécontent dans la salle. La présidente de séance reste ferme, clos les débats sur les amendements et invite les congressistes à une pause.
A la reprise de séance, notre délégation arrive en retard dans la salle de quelques minutes. Nous avons voulu faire une photographie humoristique de notre délégation et avons raté l’ouverture de séance. Le thème abordé dans la deuxième partie de la matinée est la construction de la solidarité au travers des luttes communes au sein de multinationales. Je suis particulièrement émue à l’écoute Amirul Haque Amin qui nous décrit la tragédie du Rana Plaza au Bengladesh en 2013. 1238 salariés en majorité des femmes ont trouvé la mort dans l’effondrement de l’immeuble où était regroupées des ateliers d’activités textiles pour les géants de l’habillement tels que Gap, H&M et Camaieu. 2500 blessées graves ont aussi été recensés. Amir souligne que sans l’unité internationale et la mobilisation de la CGT, entre autres, aucune indemnisation des familles des victimes n’aurait été possible. Amir remercie la CGT qui a mobilisée bon nombre de camarades afin que cette catastrophe soit connue et reconnue à travers le monde. Amir nous rappelle également que dans son pays les conditions de travail sont exécrables, le secteur du textile est plus que rentable mais que le salaire mensuel des ouvrières et ouvriers est de 84€. Le Bangladesh produit des richesses mais et ses compatriotes crèvent de faim, qu’il n’y a pas de sécurité sociale et que trop peu accède à l’éducation. A la fin de son intervention, la salle debout ovationne Amir et c’est un grand moment d’émotion partagé. La matinée s’achève avec le témoignage de Eyup Ozer, Disk Metal sous-traitant de Renault.
Après un déjeuner bien mérité (trop calorique et peu équilibré à mon gout ) les travaux de la deuxième partie de journée commencent à l’heure malgré le retard accumulé dans la matinée. La question épineuse sur le syndicalisme international va être abordée. Les secrétaires généraux de la CES et de la CSI interviennent chacun leur tour. Je suis étonnée par le fait que certains délégué.e.s ne rejoignent pas leur place, reste dehors et entame l’Internationale. Les débats s’ouvrent avec l’intervention de Saïd de la Fédération du Commerce qui rappelle le rôle controversé de la CES et la CSI et se positionne clairement sur une appartenance à la FSM. Sébastien de la Fapt 94 rappelle l’importance d’appeler à un rassemblement le plus large possible. L’UD 94 renchérit et demande un amendement pour que la CGT obtienne un statut d’observateur à la FSM. S’ensuivent les interventions d’un camarde Cheminots qui nous sensibilise sur les conditions de travail des ouvriers du rail au Mali. Corinne déléguée pour l’Ursaff nous rappelle l’importance des formations sur les enjeux du syndicalisme européen pour toutes et tous.
Une amorce de débat est entamée sur la prise en compte d’amendements portés par des syndicats. La tribune annonce un vote sur le thème 5 et nous devons nous positionner sur le fait de rajouté ou non la FSM dans notre document d’orientation. Nous sommes un peu perdus ne sachant sur quoi exactement nous devons voter. En effet, la formulation employée, je la trouve pour ma part ambiguë. Je suis confortée dans mon sentiment car les autres délégués des autres fédérations semblent aussi incertain.e.s que moi. S’en suit une certaine confusion dans la salle, des conciliabules ont lieu et certains délégués scandent « le débat, le débat ! ».
Le vote se fait dans la confusion générale et sera invalidé après la pause. La séance reprendra avec du retard, et nous serons donc invités à nous prononcer de nouveau sur notre affiliation à la FSM, toujours à main levée.
La deuxième partie de l’après-midi est consacrée au thème 2 : le statut de celles et ceux qui travaillent et le Nouveau Statut du Travailleur Salarié. Aux reprises des interventions des camarades bon nombre d’entre eux s’inquiètent de la future réforme des retraites et du financement de notre sécurité sociale. Une camarde de l’entreprise Danone souligne la valeur de la force de notre travail. Nombreux sont celles et ceux qui dans leur intervention appellent à une révolution nécessaire afin de ne pas perdre nos conquis sociaux, à l’instar d’une camarade marseillaise de l’APHP Hôpitaux Publics qui cite Ambroise Croizat. L’intervention la plus émouvante fut celle d’une déléguée des Ports et Docks, nettoyage. Claudine se bat au quotidien contre la précarité, les salaires de misère, la reconnaissance de la pénibilité de son travail. Claudine fait partie de ces invisibles qui sont trop peu mis en lumière. J’avoue que les larmes me sont montées aux yeux et s’est dans un même élan que toute la salle s’est levée pour lui faire une acclamation.
La fin de la séance de ce mercredi après-midi se termine par le vote du thème 2 dont les résultats seront connus dès demain matin, à la reprise des débats.
Cette journée fut riche en débat et en émotion. On en peut que regretter le manque de temps pour d’autres interventions et certains flous quant à l’organisation des prises en compte des amendements présentés par les délégué.e.s.
Avec du retard, car nous avons fini à plus de 19H00 nous rejoignons le lieu pour notre diner fraternel fédéral.
Un clin d’œil spécial à Laila qui est venue nous voir mardi et mercredi matin et avec qui nous avons pu réaliser une photo digne du Festival de Cannes !
Elisabeth,
Déléguée au 52e Congrès confédéral