Il est minuit moins une.

Toutes les forces de la CGT doivent rentrer dans la bataille pour ouvrir des perspectives de progrès et empêcher l’extrême droite d’accéder au pouvoir

Depuis dimanche soir, après le traumatisme des européennes et la sidération de la dissolution, nos initiatives sont en train de changer la donne. Après des initiatives souvent spontanées rassemblant beaucoup de jeunes toute la semaine, les manifestations du week end des 15 juin et 16 juin ont vu défiler 680 000 personnes dans toute la France (plus de 800.000 sur l’ensemble de la semaine).

Cette mobilisation populaire a conduit la gauche à s’unir, à s’entendre sur un programme et des candidatures uniques.

Pour autant, la menace est loin d’être écartée puisque les prévisions donnent pour l’instant au RN une majorité, peut-être même absolue.

La violence de l’extrême droite se révèle : ce ne sont que des prémices

Pour « fêter » la victoire de leur candidat le 9 juin, 4 militants d’extrême-droite dont le leader du GUD (et fils d’un dirigeant du RN), ont tabassé un jeune homosexuel à Paris, en promettant de faire pire après l’accession au pouvoir de Bardella.
L’extrême-droite n’est pas une force politique comme les autres. Elle rassemble toujours des groupuscules ultra-violents, racistes, antisémites, sexistes et homophobes dont les pratiques courantes visent à terroriser leurs adversaires. Trois de ces attaques ont même été mortelles depuis 2019 !

Les pouvoirs que confère la 5e république au premier ministre, qui contrôlera en plus la majorité de l’Assemblée nationale, sont considérables et uniques parmi les démocraties du monde :

  • il écrit la loi et peut même se passer de vote de l’Assemblée pour réformer par décret ou par ordonnance,
  • Il contrôle le ministère de l’intérieur, la nomination des préfets et des forces de police, celui du ministère de la justice, l’avancement des procureurs, le ministère du travail (il a le dernier mot pour autoriser ou non le licenciement des salaries protégés)
  • Il nomme aussi 3 membres de l’Arcom (autorité de contrôle des medias et internet).

Jamais la CGT ne mettra un signe égal entre l’extrême droite et une quelconque autre force politique. Il y a une différence de nature qui tient à ce que si l’extrême droite arrive souvent par les urnes, elle refuse de rendre le pouvoir. Soit parce qu’elle combat le résultat des élections, en tentant d’organiser des putsch comme aux Etats Unis et au Brésil, soit parce qu’elle change les règles du jeu pour être sûre de ne pas perdre les élections, à l’image de ce que Meloni tente d’imposer en Italie avec une réforme constitutionnelle qui remet en cause l’indépendance de la justice et les prérogatives des syndicats. C’est ce à quoi s’appliquera Bardella sitôt son entrée à Matignon. Il mettra tout en oeuvre pour être sûr que le RN gagne la présidentielle en 2027, en s’attaquant à tous les contre-pouvoirs : les médias, les syndicats et la justice notamment.

Il nous faut donc tout faire pour empêcher ce scénario catastrophe. Le CCN appelle les militants CGT à prendre conscience du danger mortel que représente le RN.

L’extrême-droite au service du capital

Ces derniers jours, la chute de la Bourse a été organisée par le capital pour remettre les exigences financières au premier plan : les promesses sociales menacent les profits donc vous devez donner des gages que vous ne changerez rien.
Sans surprise, l’extrême-droite a répondu docilement à cette injonction en reniant les promesses de revenir sur la réforme des retraites de Macron. Les tergiversations incessantes du RN démontrent son imposture sociale. Jamais il n’affrontera le patronat, jamais il n’abrogera la réforme des retraites.
L’extrême-droite est au service du capital. Elle n’a aucune intention de tenir ses promesses sociales, qui sont d’ailleurs contraire à son corpus idéologique ultra-libéral.
Dans le programme du RN, la privatisation de l’audiovisuel public le prouve. Un candidat a même affirmé qu’il fallait confier le service public postal à Amazon !
Le RN au pouvoir ce sont des lois contre les libertés syndicales, contre les droits syndicaux, contre le droit de grève, le RN l’annonce lui-même !
L’alliance entre une partie de la droite et l’extrême droite avec le ralliement d’Eric Ciotti a été organisée par Vincent Bolloré, patron milliardaire.

La CGT, indépendante mais pas neutre !

L’apolitisme, c’est-à-dire l’interdiction d’aborder des débats politiques, est souvent le cheval de Troie de l’extrême-droite. Dans l’idéologie de celle-ci, les salariés ne doivent pas s’occuper de l’organisation de la société ou même des grands choix des entreprises. L’extrême-droite défend la collaboration de classe (on est tous dans le même bateau donc les décisions patronales ne doivent pas être contestées). C’est pour cela que la charte du travail de Vichy (1941) interdit les confédérations syndicales et veut les remplacer par des corporations. Elle interdit également la grève.

Par méconnaissance, et vu la pression patronale et la confusion sur l’extrême-droite, des syndiqués CGT estiment que le syndicat « ne doit pas faire de politique ».
S’il est vrai que la CGT ne veut pas être partisane de telle ou telle force politique, elle ne s’interdit jamais de s’exprimer sur la situation politique. Celle-ci a un impact direct sur la situation sociale des salariés et retraités, il est donc nécessaire de s’en préoccuper. La CGT est indépendante mais pas neutre !
Le congrès d’unification de Toulouse, en 1936, entérine même « la collaboration momentanée avec les partis lorsque les circonstances l’exigent ».
Des limites existent néanmoins : nos statuts interdisent l’utilisation du sigle ou de l’appartenance à la CGT dans une élection (article 6), et les membres du BC sont automatiquement démissionnaires s’ils sont élus à un mandat politique national (article 30).

Dans la situation actuelle, quand un parti politique d’extrême-droite risque d’accéder au pouvoir, menaçant les acquis sociaux et les libertés, il est légitime que la CGT se mobilise !

Une alternative se dessine grâce au mouvement social.

Le Nouveau Front Populaire s’est entendu sur un programme de rupture avec les politiques néolibérales portées par le patronat et de nombreux gouvernements. Il contient de nombreuses mesures qui reviennent sur les attaques des précédents gouvernements (abrogation de la réforme des retraites et de l’assurance chômage, de la loi Kasbarian sur le logement, de parcoursup du « choc des savoirs », de la fusion ASN/IRSN, de la loi asile immigration…) et des avancées structurantes pour répondre aux urgences, la reprise des 10 points de la déclaration intersyndicale du 10 juin ainsi que certaines des revendications CGT (Smic à 2000€ brut, indexation des salaires sur les prix, augmentation des pensions, retraite à 60 ans, investissements dans les services publics et notamment les hôpitaux et l’éducation, pôle public bancaire, pôle public du médicament, plan de reconstruction industrielle, loi énergie, 32h, retour des CHSCT, égalité F/H et lutte contre les violences sexistes et sexuelles, régularisation des sans papier, police de proximité…). Ce n’est pas un texte qui prend en compte toutes nos revendications, mais ce serait un immense bol d’air pour toute la société et le monde du travail en particulier !

La bataille va être très rude contre les fascistes, bien sûr, mais aussi avec le patronat qui voit avec une grande inquiétude la possibilité que le rapport de force s’inverse. Pour rendre possible ces avancées, et
pousser plus loin les mesures, nous devons établir des rapports de forces partout dans les entreprises et dans la société.

Au vu de la gravité de la situation, le CCN considère que la CGT doit prendre ses responsabilités. Le CCN considère que le programme du nouveau front populaire est celui qui répond le mieux aux attentes et aspirations des travailleuses et des travailleurs et qui ouvre le plus de possibilités de mobilisations gagnantes. La CGT appelle les salariés, retraités et privés d’emploi à aller voter le plus nombreux et nombreuses possible les 30 juin et 7 juillet pour le programme du nouveau front populaire. Cela ne constitue certainement pas un chèque en blanc et encore moins une remise en cause de l’indépendance de la CGT qui protégera toujours sa liberté d’expression et d’action. La CGT ne présente pas de candidat.e.s aux élections législatives et compte bien exercer pleinement son rôle syndical de construction du rapport de force et d’interpellation des élu.es politiques. Rien ne sera jamais acquis sans la lutte. Dès le lendemain du second tour, le 8 juillet les nouveaux élus seront sous surveillance sociale.

Le CCN appelle les syndicats CGT à multiplier les mobilisations pour exiger des réponses aux besoins sociaux. Les 20 et 27 juin, nous appelons à multiplier les actions sur les lieux de travail, y compris par la grève, pour faire monter les revendications professionnelles et notamment les exigences d’augmentation de salaires et de maintien de l’emploi.
Le 23 juin, nous appelons à de nouvelles grandes manifestations contre l’extrême droite, à partir de l’appel unitaire féministe. Il convient de prendre les dispositions pour que personne ne manque à l’appel ! Les manifestations du 23 juin doivent être encore plus massives que celles des 15 et 16 juin, avec des cortèges professionnels et d’entreprises pour créer des dynamiques à partir des lieux de travail !

Des mesures concrètes d’organisation pour débattre et mobiliser

La réactivité et la mobilisation des militants de la CGT doivent s’amplifier.
Encore un trop grand nombre de nos syndicats sont absents des actions, et ne répondent pas aux sollicitations. C’est un véritable problème qui ne peut plus durer.
Les agendas doivent être allégés pour privilégier le temps de déploiement. L’Assemblée nationale est dissoute et le Sénat a suspendu ses travaux, il nous faut nous aussi, suspendre, sauf urgence, les réunions avec les patrons pour concentrer tout notre temps militant sur la construction de la mobilisation!

Une véritable organisation doit être mise en place pour se répartir les responsabilités :

  • Mener les débats dans l’entreprise, solliciter les salariés pour participer aux actions programmées ;
  • Mener le débat avec nos adhérents retraités et se déployer pour faire grossir les rangs et gagner sur neurs revendications (pensions, revalorisation des pensions …) ;
  • Se mettre à disposition de l’union locale ou de l’union départementale pour faire le tour téléphonique des syndicats non mobilisés, et pour organiser des distributions dans les entreprises où la CGT n’est pas organisée.
  • Inviter l’ensemble des syndiqué.e.s à participer aux manifestations, notamment celle du dimanche 23 juin, et à voter les 30 juin et 7 juillet.

Les formes d’initiatives pour favoriser les discussions peuvent être diverses : soirée débat, accueil café à l’entrée des entreprises (ou dedans quand c’est possible) …
Les formes d’action revendicatives peuvent également être diverses. Un syndicat qui n’a pas l’habitude ou les forces de faire grève peut commencer par une pétition sur les salaires ou tout autre sujet. Des cortèges d’entreprise doivent être organisés dans les manifestations pour créer une dynamique collective.

Il convient enfin, dans tous les territoires, professions et entreprises, de convoquer des intersyndicales les plus larges possibles en s’appuyant sur le texte de l’intersyndicale du 10 juin dernier.

Face à la menace fasciste, faire adhérer en masse !

Un soin particulier doit être mis dans la syndicalisation : les demandes d’adhésions ont été multipliées par
quatre depuis une semaine, cela pourrait être encore plus élevé avec des mesures volontaristes de notre part. Il faut accueillir toutes les nouvelles et nouveaux et faire adhérer en masse. Face à la menace fasciste, nous avons plus que jamais besoin de renforcer la CGT !

Le CCN appelle tous les syndicats à s’engager. Aucun ne doit rester en dehors de la bataille. Un front populaire ne se décrète pas, il se construit. Chaque geste compte !


Pour vous aller à la discussion avec les salarié·e·s, la confédération met à votre disposition un kit militant, accessible sur Kit militant contre l’extrême droite | CGT

Il est minuit moins une.