Comme nous vous en avions informé, la CGT a contesté le jugement du Tribunal Administratif (TA) qui confirmait la validation du PSE par la DIRECCTE. L’audience s’est tenue le 3 août 2016 devant la Cour Administrative d’Appel (CAA) de Paris. Le rapporteur a demandé l’annulation du jugement du TA et de la décision de la DIRECCTE. La cour a suivi le raisonnement du rapporteur, le PSE est donc annulé.
Avant d’aller plus loin, il convient de noter que ce jugement n’est pas encore définitif. Un pourvoi en cassation aura certainement lieu devant le Conseil d’Etat (CE), équivalent pour le droit administratif de la Cour de Cassation. Mais en attendant la décision du CE, ce jugement de la CAA doit être appliqué.
La CAA de Paris a choisi d’annuler sur la base d’un argument (ou « moyen » dans le jargon juridique) relativement technique, moyen qui, comme l’a bien expliqué le rapporteur pendant l’audience, n’en demeure pas moins important puisqu’il définit le cadre dans lequel s’exécute le PSE et qu’il a vocation à s’appliquer à de nombreux autres PSE.
Une contestation basée sur des arguments de fond
Pour autant, comme nous l’avions expliqué à l’époque, nous avions d’autres motifs de contester le PSE, et en particulier le fait qu’il ait été conçu pour cibler très précisément une population limitée (Toulouse, Saint-Denis et Lyon, en excluant Car*Base en tant que pseudo-entité autonome, avec des catégories très fines). Et l’inefficacité du PSE s’est confirmée : la direction n’a redressé provisoirement les comptes de l’entreprise qu’en vendant, là ou elle avait des difficultés, à marge nulle au lieu des 30 % qu’elle imposait auparavant aux commerciaux. Nous avons donc toutes les raisons de nous satisfaire de cette décision qui va ouvrir la voie à l’indemnisation de l’ensemble des salariés licenciés dans le cadre du PSE.
Bien entendu, la question se pose des conséquences pour nous, les survivants de la société PITS. La société a déjà en partie répondu : son avocat a essayé de faire pression sur la Cour en indiquant qu’une décision d’annulation du PSE empêcherait le plan de continuation. Il est clair que nous ne pouvons nous réjouir d’une telle prise de position. Pour autant, aurait-il fallu renoncer à notre action pour cela ? Nous ne le pensons pas.
De nouveau, le chantage à l’emploi ?
Lorsque M. Mérindol est venu la première fois rencontrer le CE, nous lui avons rappelé qu’une contestation du PSE était en cours devant la justice. Il ne pouvait ignorer ce « risque juridique », comme on dit. Dès lors, ce risque était assumé. A aucun moment il n’a d’ailleurs été question de solliciter un retrait de la procédure. Alors, certes, cette décision aura un coût. Mais pourquoi ne pas demander à la direction sortante d’assumer ce coût ? Après tout, c’est M. Mérindol qui prévoit de compenser le compte courant (4M €) que la direction sortante a refusé de rembourser malgré la demande de l’administrateur, et alors même qu’une instruction pour abus de biens sociaux est par ailleurs toujours en cours, à la suite notamment d’un courrier de la CGT au Procureur de la République.
Le plan de continuation était déjà conditionné par l’abandon par la collectivité d’une très grande part des dettes accumulées par la direction actuelle du groupe, les dettes privées abandonnées étant en partie compensées fiscalement. C’est donc très majoritairement l’argent public qui permet le maintien de nos emplois, pour une durée très incertaine – rappelons quand-même que M. Mérindol a refusé d’accorder quelque garantie d’emploi que ce soit devant le CE. Devions-nous également faire renoncer à leurs droits les salariés licenciés en janvier dernier pour « le bien » de ceux qui restaient ?
Déjà au 1er trimestre 2015, c’est cette même logique de chantage qui a permis à la direction d’obtenir le retrait du droit d’alerte émis par le CE en échange d’une moindre dégradation de notre mutuelle. Curieux marché qui lui a permis de continuer à creuser le passif de la société pendant plusieurs mois, aggravant la situation économique de l’entreprise.
Il est vrai que si le CE avait suivi les propositions de la CGT, nous aurions alerté le Tribunal de Commerce dès la fin 2014 sur l’état économique déjà critique de la société. Nous aurions alors, en agissant plus tôt, pu limiter les effets dévastateurs d’un PSE.
Nous l’avions dit, nous combattrons jusqu’au bout ce PSE injuste
Nos divers interlocuteurs savent parfaitement qu’ils prennent des libertés avec le droit, et que celui-ci est conçu de telle manière que cela n’entraîne guère de risques pour les contrevenants et autres « délinquants en col blanc ». Ainsi, quand nous disions à un membre de l’entourage de l’Administrateur qu’il perdrait en justice (c’était à propos de « l’adéquation économique », les mesures de la première mouture du PSE qui comportaient des baisses de salaires allant jusqu’à plus de 30 %), il nous répondait : « Ah, oui ! …en Cassation… » (Entendez : « ce n’est pas un problème, vu les délais de la procédure prud’homale »).
Notons aussi que, si quelques élus ont accepté d’être licenciés dans le cadre du PSE, d’autres, dont le signataire de l’accord de PSE, ont contesté l’autorisation de leur licenciement par la DIRECCTE. C’est tout-à-fait leur droit et s’ils gagnent (et ce sera le cas grâce à notre victoire juridique), ils pourront être réintégrés.
Mais qu’en est-il des salariés qui ne bénéficient pas du statut de salarié protégé ? Doivent-ils renoncer à leur droit à une indemnisation ? Pour la CGT, c’est non, car nous défendons les droits de tous les salariés, sans distinction. C’est désormais à la direction sortante de prendre ses responsabilités et d’apporter enfin une contribution à l’entreprise, elle qui vit grassement de notre société sans véritable engagement financier !
La CGT organisera dès la rentrée, comme elle s’y était engagée, pour les salariés licenciés qui le souhaitent, la contestation de leur licenciement économique devant le Conseil des Prud’hommes, afin qu’ils réclament l’indemnité à laquelle ils pourront prétendre si la décision de la CAA de Paris n’est pas cassée par le Conseil d’Etat.