Négociation du télétravail : des forfaits dégradés pour les télétravailleurs, à l’heure où la gestion des locaux fait la part belle au télétravail
Comme annoncé dans les bulletins n°224 & 225, le patronat a décidé de renégocier le temps de travail et plus particulièrement les forfaits heures et les forfaits jours (modalités 2 et 3) aux détours de la négociation sur le télétravail, ce dernier étant relayé au rôle de la carotte contre le recul des droits des salariés :
- Baisse des conditions d’éligibilité pour la modalité 3, qui se déploiera pleinement en profitant des mouvements de personnel (cf. Perspectives n°225).
- Création de nouvelles modalités de forfaits annuels en heure pour les télétravailleurs, forfaits dégradés, permettant à l’employeur de s’exonérer de toute condition d’éligibilité, condition qui avait été établie en son temps par rapport à la classification et à l’autonomie du salarié. Bref, si visiblement l’autonomie est décisive pour avoir accès au télétravail, elle ne l’est pas pour le travail en forfait. L’opportunisme patronal ne s’encombre pas des questions de cohérence quand il s’agit de profiter davantage des salariés.
Ainsi, le patronat se propose de refondre la modalité 2 destinée aux télétravailleurs de telle sorte qu’il ne s’agisse plus d’un forfait heure par rapport auquel le décompte du temps se fait en cours d’année mais bien un droit de « tirage » pour l’employeur qui est le seul décideur de la durée du forfait. Deux nouvelles modalités sont envisagées :
Il est précisé que les heures accomplies par le salarié au-delà de la durée contractuelle du travail fixée par la convention de forfait ouvrent droit à un complément de rémunération, au plus tard à la fin de la période annuelle de décompte de l’horaire. Mais évidemment rien n’est précisé sur ce que signifie « complément de rémunération ». Au-delà du forfait, les heures supplémentaires s’imputent sur le contingent d’heures supplémentaires et doivent être majorées de +50%.
Là encore, l’intensification du travail pourra potentiellement donner lieu à de substantielles économies pour l’employeur.
Et comme le diable se niche dans les détails, il est fort à parier qu’un salarié recruté sur un forfait de ce type ne pourra pas bénéficier de la modalité 2 telle qu’elle existe aujourd’hui dès qu’il rompra avec le télétravail. Il faut dire, nombre d’entreprises n’hésitent plus à imposer le télétravail en ne mettant plus à disposition les locaux suffisants pour l’ensemble du collectif de travail.
Le télétravail se négocierait donc contre des forfaits dégradés et un appauvrissement des conditions faites aux salariés dans une branche au sein de laquelle certaines de plus grosses entreprises affichent des croissances à deux chiffres, des dividendes records mais de réelles difficultés d’embauches. Faut dire, mieux vaut être actionnaire que salarié !