Un lieu où il ne fait pas bon travailler : Argumentaire pour la création d’un meilleur environnement de travail chez Teleperformance

Rapport du syndicat international UNI Global Union (UNI) dont notre Fédération est membre.

En 2021, Teleperformance (TP) a enregistré une croissance record, avec un chiffre d’affaires s’élevant à 7,1 milliards d’euros, soit une hausse de 24,1 pour cent par rapport à 2020, et ses bénéfices nets ont augmenté de 71,9 pour cent, pour atteindre 557 millions d’euros[1].

Mais si la réputation et les bénéfices de l’entreprise ont grimpé en flèche, le taux de rotation volontaire du personnel de TP a atteint plus de 75 pour cent[2].
Ce taux de rotation stupéfiant indique qu’il existe des problèmes importants dans la culture d’entreprise de Teleperformance qui l’empêcheront de créer ce que son administrateur principal indépendant, Patrick Thomas, a appelé « le meilleur environnement de travail possible pour nos employés, dont nous croyons fermement qu’ils constituent la pierre angulaire de la réussite de Teleperformance. »[3]

En tant que société d’externalisation des processus métiers (BPO) parmi les plus importantes et les plus prospères au monde, Teleperformance a la responsabilité d’établir des normes élevées pour le secteur. L’entreprise fait également peser des risques sur son succès à long terme et, en fin de compte, sur ses actionnaires si elle ne parvient pas à conserver son personnel qualifié – la pierre angulaire de sa réussite – en particulier dans l’environnement post-pandémique de pénurie extrême de main d’œuvre qui sévit dans de nombreux secteurs.

Pendant les deux premières années de la pandémie, les 420.000 employé-e-s de l’entreprise, répartis dans 3 pays, ont servi sans relâche les clients, malgré la perturbation des habitudes quotidiennes et le transfert de près de la moitié des effectifs des centres d’appels vers leur domicile. Les travailleuses et travailleurs de TP ont assuré une communication vitale avec les clients avant, pendant et après les confinements pour le compte d’entreprises privées parmi les plus puissantes au monde, dont Apple, Google, Amazon et Vodafone. Les travailleuses et travailleurs de Teleperformance ont également servi de lien entre des clients du secteur public aux États-Unis, en France, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas et les citoyens de ces pays qui avaient besoin d’informations essentielles sur le Covid-19, les procédures de visas, l’interprétation et d’autres services vitaux.

Dans le présent rapport, UNI Global Union (UNI) document les pratiques inquiétantes liées au temps de travail non rémunéré, aux problèmes de santé et de sécurité, à la surveillance excessive et au manque de pleine liberté syndicale pendant la pandémie pour le personnel de Teleperformance. Ce sont pourtant ces mêmes employé-e-s dont le travail a alimenté la croissance et les bénéfices records de l’entreprise.

Nous estimons que lorsque TP se livre à des pratiques peu éthiques, malsaines ou dangereuses, l’entreprise nuit non seulement à ses propres employé-e-s, mais aussi aux travailleuses et travailleurs du secteur à l’échelle mondiale. Elle s’expose également, ainsi que les sociétés auxquelles elle offre ses services, à un risque pour sa réputation.

Une grande partie de la progression du secteur BPO étant liée à la croissance des clients, notamment des entreprises technologiques, les normes du travail dans ce secteur joueront un rôle important dans le monde du travail de demain. TP doit montrer la voie en établissant les normes de travail les plus élevées, pour l’avenir du secteur.

Un avenir dans lequel, selon les prévisionnistes et Olivier Rigaudy[4], directeur général adjoint de TP, une grande partie des employé-e-s de Teleperformance travailleront à domicile, en fonction des souhaits de leurs clients et de la qualité de l’Internet et de l’électricité dans chacun de leurs pays. Dans cette optique, il est important pour TP d’aborder les questions soulevées dans ce rapport, qui concernent ses employé-e-s travaillant à domicile et dans ses centres d’appels.

Le présent rapport du secteur des services d’information, de communication et de technologie d’UNI Global Union (UNI ICTS) résume les résultats d’une enquête de l’OCDE de 2020-2021 et de nouvelles preuves de la culture d’entreprise problématique de TP fondées sur des entretiens menés avec des représentants des travailleurs de 12 syndicats dans 11 pays, qui ont eu lieu entre octobre 2021 et mars 2022.


  1. « Teleperformance: Record Growth in 2021 » [Teleperformance: croissance record en 2021], BusinessWire, 17 février 2022, https://www.businesswire.com/news/home/20220217005612/en/Teleperformance-Record-Growth-in-2021-Growth-in-Revenue-of-25.7-Like-for-like-and-in-Net-Profit-Of-71.9.
  2. Le taux de rotation a été calculé sur la base d’un nombre moyen d’employés pour l’année, et s’élève à 75,23252 %. Voir les effectifs totaux chez Teleperformance, Universal Registration Document [Document d’enregistrement universel], 2021, 28 février 2022, p. 86, https://teleperformance.com/media/pwdpryyd/telep_deu_2021_uk_mel_mention.pdf
  3. Patrick Thomas, « Letter from the Lead Independent Director to Shareholders », [Lettre de l’Administrateur principal indépendant aux actionnaires] MarketScreener, 7 mars 2022, https://www.marketscreener.com/quote/stock/TELEPERFORMANCE-SE-4709/news/Teleperformance-Letter-from-the-Lead-Independent-Director-to-Shareholders-39686220/.
  4. Entretien avec Olivier Rigaudy, BFM Business, 4 novembre 2021, https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/olivier-rigaudydirecteur-general-de-teleperformance-teletravail-j-imagine-mal-que-l-on-revienne-a-une-situation-identique-d-avant-la-crise-je-ne–crois-pas-que-ce-soit-possible-ni-souhaitable_VN-202111040112.html

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