ANALYSE DU PROJET GOUVERNEMENTAL DE RÉFORME DES RETRAITES

La CGT, comme la plupart des autres organisations syndicales, lutte contre ce projet particulièrement injuste et qui ne pérennise pas, contrairement à ce qu’affirme le gouvernement, notre système de retraite.
D’autres solutions existent, et la CGT défend son propre projet.

Mais le gouvernement, en ne prenant en compte que trop marginalement le levier des recettes, veut faire supporter les efforts essentiellement par les salariés en s’inscrivant dans une stratégie de diminution progressive des retraites.

Pour autant, les salariés du notariat nous manifestant leur inquiétude pour le niveau de leur couverture sociale gérée par la CAISSE DE RETRAITE ET DE PREVOYANCE DES CLERCS ET EMPLOYES DE NOTAIRES (CRPCEN), nous livrons ci-après une brève analyse des dispositions gouvernementales qui auront ou sont susceptibles d’avoir une incidence sur leurs droits futurs.
Cela n’implique pas que nous considérions ce projet comme inéluctable et nous comptons bien que la lutte actuelle conduira le gouvernement à reculer.

1er point – Le recul de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite concerne aussi les régimes spéciaux

Cet âge légal sera bien porté à 62 ans pour les régimes spéciaux, et donc pour la CRPCEN, à raison d’un recul de 4 mois chaque année, mais avec un décalage de la date d’effet (2017 au lieu de 2011).

Pour le régime général et celui de la Fonction Publique, cette mesure prend effet dès 1er juillet 2011.
Ainsi, un salarié né au 1er juillet 1951 qui aura donc 60 ans au 1er juillet 2011, pourra prendre sa retraite à 60 ans + 4 mois.
Celui né au 1er janvier 1952 aura sa retraite à 60 ans + 8 mois, et ainsi de suite, celui né au 1er janvier 1956 ou après ayant droit à sa retraite à 62 ans.
Le salarié né avant le 1er juillet 1951 conserve son droit à retraite à 60 ans.

Pour les régimes spéciaux (dont la CRPCEN), la date d’effet du recul de l’âge légal sera au 1er janvier 2017 pour tenir compte du calendrier de mise en œuvre de la réforme de 2008.
Ainsi, un salarié né au 1er janvier 1957 aura sa retraite à 60 ans + 4 mois, celui né au 1er janvier 1958 aura sa retraite à 60 ans + 8 mois, et ainsi de suite, celui né au 1er janvier 1962 et après ayant sa retraite à 62 ans.
Le salarié né avant le 1er janvier 1957 conserve ses droits à retraite à 60 ans.
Lorsque ces droits à retraite sont ainsi ouverts, le salarié en conserve le bénéfice, même s’il décide de différer son départ effectif.

Dans le régime de la Fonction Publique, lorsque le salarié bénéficie actuellement d’un droit à retraite avant 60 ans, le recul de deux ans (également à raison de 4 mois par an) s’appliquera à cet âge de départ. Exemple : âge actuel à 55 ans = âge futur à 57 ans.
Autrement dit, lorsque la possibilité de départ avant 60 ans existe, elle n’est pas remise en cause, contrairement à ce qui a été exigé de la CRPCEN dans la réforme de 2008.
Ce principe devrait s’appliquer aux régimes spéciaux, ce qui conduira, à la CRPCEN, à tenir compte du calendrier du report de l’âge de 55 à 60 ans opéré par le décret du 15 février 2008 pour les salariés ayant 25 ans de cotisations à la CRPCEN.
Il en résulte que les salariés nés avant le 1er juillet 1957 qui ont un droit ouvert entre 55 et 59 ans, soit avant le 1er janvier 2017, conserveront le bénéfice de l’âge prévu par le décret précité du 15 février 2008 (exemple du salarié né au 1er semestre 1957 : âge de retraite à 59 ans et droit ouvert au 1er semestre 2016).
Le salarié né au 2ème semestre 1957 a un droit ouvert à l’âge de 59 ans + 6 mois, soit au 1er semestre 2017. Il devrait voir son âge de retraite porté à 59 ans + 10 mois (recul de 4 mois).
Comme dit ci-dessus, celui né au 1er janvier 1958, dont l’âge actuel de retraite est à 60 ans, verra cet âge porté à 60 ans + 8 mois.
Pour ses salariés n’ayant pas 25 ans de cotisations à la CRPCEN, le calendrier des régimes spéciaux indiqué ci-dessus s’applique intégralement.
Un décret précisera, le moment venu, les modalités d’application.

A noter que l’âge de départ à partir duquel la décote ne s’applique pas, même pour les salariés n’ayant pas une carrière complète (âge légal + 5 ans) sera progressivement augmenté de 2 ans pour atteindre 67 ans.
Pour la CRPCEN, l’âge à partir duquel la décote ne s’applique pas a fait l’objet, dans le décret du 15 février 2008, d’un calendrier de passage progressif de 61 à 65 ans d’ici à 2024. Il faudra donc tenir compte de ce calendrier pour déterminer son évolution progressive vers 67 ans.

L’intersyndicale avait raison !
On se souvient que, lors de la réforme opérée à la CRPCEN par le décret du 15 février 2008, l’intersyndicale CGT, CFDT et CGC n’avait pas accepté le report de l’âge d’ouverture du droit à retraite de 55 à 60 ans à raison de deux semestres par an (soit en seulement 5 ans).
Après la publication du décret elle avait poursuivi sa lutte et multiplié les démarches, pétitions, etc… (et même une procédure engagée par la CGT) pour obtenir que la période transitoire de 5 ans soit portée à 10 ans. En vain, à cause de l’accord donné par la Fédération des Clercs FO au décret. Cette Fédération FO soutenait alors qu’à défaut d’acceptation de cette courte transition le gouvernement aurait imposé un recul immédiat. Elle ironisait même sur l’action de l’intersyndicale.
On voit aujourd’hui que la Fédération FO a eu tort puisque le rythme que le gouvernement propose pour le recul de l’âge légal est de 4 mois par an (au lieu de 12 mois lors de la réforme CRPCEN).
A ce rythme, le passage de 55 à 60 ans aurait eu lieu en 15 ans (au lieu de 5 ans) et les salariés devant attendre 60 ans auraient été ceux nés à partir du 1er janvier 1964 au lieu du 1er janvier 1958.
La vérité finit toujours par éclater. Mais il est trop tard pour les salariés concernés.
Bonjour tristesse !!!

2ème point – La durée de cotisations nécessaire pour une retraite à taux plein

Le projet ne contient aucune disposition à cet égard.
Lorsque le gouvernement annonce une durée de cotisations de 41 ans + 1 trimestre puis de 41 ans + 2 trimestres, il ne fait pas référence au projet de loi, mais à l’application de la loi Fillon de 2003 qui fait varier cette durée en fonction de l’espérance de vie.
Ce principe est déjà applicable à la CRPCEN en vertu de la réforme résultant du décret du 15 février 2008, mais avec un décalage de 4 ans par rapport au régime général (41 ans en 2016 au lieu de 2012). Ce décalage devrait donc se retrouver pour les échéances à 41 ans + 1 trimestre puis 41 ans + 2 trimestres.

3ème point – Les autre dispositions du projet relatives aux prestations ne concernent pas la CRPCEN

Il s’agit, pour ne citer que les deux principales :
1 – De la disparition progressive dans le régime de la Fonction Publique, de la pension sans condition d’âge pour les parents de 3 enfants, ayant 15 années de cotisations. Elle ne sera maintenue que pour ceux qui rempliront ces conditions au 1er janvier 2012.
2 – Du maintien du dispositif relatif aux salariés ayant commencé à travailler très jeunes, qui sera complété par une disposition maintenant à 60 ans l’âge de la retraite des salariés ayant commencé à travailler avant 18 ans.

Ces deux dispositifs existent à la CRPCEN ;
Mais on peut penser que le gouvernement voudra étendre à la CRPCEN les mesures figurant dans le projet de loi. Il suffit pour cela d’un décret.
La disparition de la pension sans condition d’âge pour les parents de trois enfants pénaliserait surtout les mères de famille.

4ème point – Des mesures de ressources essentiellement fiscales

Ces mesures ne sont pas à la hauteur des enjeux.
La question est posée de savoir si un système de péréquation sera mis en place entre l’ensemble des régimes. A défaut, la CRPCEN ne tirerait aucun bénéfice des dites mesures.
A noter que les Fonctionnaires vont voir leurs cotisations retraite passer de 7,85 % à 10,55 % en 10 ans.
La demande de mise à niveau faite à la CRPCEN par l’intersyndicale était donc opportune mais :
– l’augmentation pour les salariés a été réalisée sans aucun étalement, et surtout elle a été supérieure de 1 point à la simple mise à niveau.
– la mise à niveau également demandée pour les cotisations sur salaires des employeurs n’a été que partiellement réalisée (3,24 % au-dessous).

5ème point – Mesures générales

Il s’agit essentiellement :
– de la mise en place d’un comité de pilotage des régimes de retraites. Les régimes sont concernés dans leur ensemble, et donc la CRPCEN.
– de dispositions d’aide à l’emploi des Seniors, qui devraient s’appliquer au notariat.

6ème point – Une observation

Les modalités de calcul des pensions pour le régime de la Fonction Publique, et a fortiori dans les grands régimes spéciaux, ne sont mas modifiées (salaires des 6 derniers mois – taux plein de pension de 75 %).
Il serait donc injuste et choquant que celles de la CRPCEN soient modifiées à la baisse.
Et encore plus si c’était à l’initiative du conseil d’administration.

Conclusions

La présente analyse est volontairement brève et donc incomplète. Elle n’a visé que les mesures les plus significatives impactant ou risquant d’impacter la CRPCEN, pour répondre aux interrogations dont les salariés nous font part.
On peut néanmoins en tirer les conclusions suivantes pour les salariés du notariat :

1 – Ils ont subi une réforme injuste (trop injuste) par le décret du 15 février 2008, avec notamment le recul de l’âge de la retraite.
2 – Ils viennent de subir une augmentation de cotisation également très injuste puisque dépassant la simple mise à niveau avec les cotisations des autres salariés.
3 – Si la réforme gouvernementale aboutit, les salariés du notariat subiront un deuxième recul de l’âge de la retraite.
4 – Cette réforme comporte le risque pour la CRPCEN de suppression de la pension sans condition d’âge pour les parents de 3 enfants.

Et, le refus des notaires et de la Fédération des clercs FO de voter au conseil d’administration du 18 décembre 2009 les mesures de retour à l’équilibre du régime proposées par l’intersyndicale, fait courir aux salariés le risque d’une 5ème couche de réforme qui ne règlerait pourtant pas la question de l’équilibre financier à court terme de la CRPCEN.

Ce n’est pas tolérable, et la CGT, avec l’intersyndicale, entend bien se battre pour faire aboutir sa demande de ressources supplémentaires par la mise à niveau des cotisations patronales et par une cotisation additionnelle sur émoluments, pour éviter cette imposture.
D’autant que le gouvernement annonce déjà un nouveau rendez-vous sur les retraites en 2018.
Que resterait-il de nos retraites après cette spirale infernale vers le bas ?

Inacceptable !

La CGT appelle les salarié-e-s du Notariat à participer à toutes les actions contre la réforme des retraites. Il ne tient qu’aux salarié-e-s, du notariat comme d’ailleurs, de faire échec à un tel projet de régression sociale !

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